Création d’un arbre généalogique

Arbre généalogique
Arbre généalogique, commande personnalisée pour un anniversaire.

Les coulisses de la calligraphe : une commande d’arbre généalogique

J’avais très envie de partager les différentes étapes qui me permettent de créer un arbre généalogique. Alors aujourd’hui, je vais passer en revue les différentes étapes d’une commande particulièrement touchante, celle d’un arbre généalogique destinée à une maman très aimée par ses enfants !

* Si vous parvenez jusqu’à la fin de cet article, vous aurez traversé un panel sentimental & émotionnel particulièrement fort, âmes sensibles, foncez !

*N’hésitez pas à jeter un oeil à mon article sur les arbres généalogiques dans l’histoire si cela vous intéresse

Premier contact

Avant toute création, il y a une prise de contact, de premiers échanges. Benjamin m’écrit et m’expose le projet : créer un arbre généalogique de grand format (1 m x 1,50 m) pour l’offrir à sa maman lors de son anniversaire. Nous avons un mois, et ce n’est pas de trop ! Je lui téléphone afin d’en savoir plus sur la personnalité de sa mère, ses goûts & ses couleurs comme on dit. Il m’explique que son intérieur est un mélange entre le CAPC (musée d’art contemporain de Bordeaux) & une brocante. Il a vu que je m’étais beaucoup intéressée aux sorcières dans ma pratique d’artiste et me dit qu’elle revient de Zugarramurdi. Je songe qu’il n’y a vraiment aucun hasard en ce bas monde et me réjouis d’avance. Il évoque cependant un univers coloré, sensible et positif, loin du noir & blanc. Je vais donc imaginer une proposition qui puisse répondre à ces envies…

Recherches graphiques

Afin de réaliser le devis, je dois commencer à produire des recherches graphiques, iconographiques & chromatiques. Je réfléchis à cette histoire de couleurs… La place du végétal est indéniable, s’agissant d’un arbre destiné à une fibre magique, je repense à différentes expérimentations que j’ai mené sur textile les années passées en impressions végétales et en viens à la conclusion qu’il va falloir réussir à dupliquer ce procédé sur papier !

Expérimentations d'impression végétales sur textile, dessin à la plume.
Un exemple de ce que j’avais expérimenté sur textile, le dessin à la plume était cependant rendu difficile par les fibres du coton… J’avais d’ores et déjà senti que la voie du papier se faisait sentir !

Ni une, ni deux, je me rue dans le jardin en quête de feuillages & je fais des essais avec la seule encre de taille douce que j’ai sous la main… du noir évidemment !

J’encre quelques feuilles, je pose les feuillages sur différents types de papier et passe mon rouleau dessus pour y laisser différentes empreintes. J’obtiens des résultats plus ou moins satisfaisants, mais je sens que je m’approche de ce que je recherche… Je réalise un petit dossier où je retravaille numériquement ces empreintes afin de suggérer une palette chromatique plus engageante en attendant d’avoir des encres colorées & de me lancer dans la réalité.

Premiers essais d'impressions végétales.
Quelques essais d’impressions à l’encre de gravure en taille-douce.

Benjamin échange avec sa famille, et tout le monde est d’accord pour que l’aventure commence, alors je commande tout ce qu’il faut et me voilà lancée dans le processus POUR DE VRAI !

A la réception, je suis excitée comme une puce face aux papiers Arches qui sont toujours de véritables oeuvres d’art. Au toucher comme au regard, ce sont de pures merveilles qui ne demandent qu’à être travaillées. J’ai hâte de réaliser ces arbres (parce que, oui, j’ai oublié de vous le dire, mais Benjamin a choisi finalement de me demander deux arbres : un arbre classique sur un format 65 x 102 cm remontant sur cinq générations & un second agnatique de format 56 x 67 cm remontant sur huit générations).

Encrages : gamme chromatique & composition

Au départ, je commence par mélanger les couleurs que je viens de recevoir. Je fais plusieurs mélanges qui sont bien trop sombres au début, puis j’arrive peu à peu à obtenir des teintes qui me semblent douces & permettront aux calligraphies noires d’être bien lisibles. La lisibilité est un critère important pour Benjamin, et cela semble évident dans le cas d’un arbre généalogique !

Essais d'impressions végétales avec les encres colorées
Des brouillons, des brouillons et encore des brouillons !

J’angoisse quelque peu sur la capacité de l’encre de gravure à absorber correctement l’encre de calligraphie. Je fais donc des essais d’écriture avant impression végétale, puis après afin de voir comment tout ce beau monde réagit.

Concernant l’espèce végétale, je retiens le Figuier. Sur le plan graphique, ses feuilles sont douces & très structurées à la fois grâce aux nervures saillantes. Sur le plan symbolique, cet arbre capable de pousser partout m’évoque une pulsion de vie admirable, une force vitale qui me paraît très pertinente dans le cadre d’un arbre généalogique. Alors je fonce au jardin & je libère mon figuier de ses rejets hihi !

J’en profite pour remonter de la verveine & de la menthe pour la tisane 😉

Après avoir partagé mes essais avec Benjamin, je me jette à l’eau ! C’est parti pour la création des fonds sur le support final !

Création des fonds végétaux des arbres généalogiques

Pour ce faire, je prépare mon support, je place le papier sur un grand carton à dessin pour éviter un gaufrage malencontreux du papier. Je prépare également une plaque de Plexiglas pour pouvoir créer mes mélanges avec l’encre de taille-douce. Je sors mes rouleaux, mon couteau & je dispose mes feuilles de figuier à proximité. Hum, j’allais oublier, il faut également beaucoup de papiers « recyclés » pour l’impression en elle-même afin de ne pas faire de tâches partout, mais regardez plutôt :

Rien ne vaut du visuel pour bien comprendre le processus d’encrage !

Après deux matinées complètes, j’obtiens mes deux fonds, je peux commencer à travailler à l’échelle sur la composition des noms !

Composition des arbres généalogiques

Avec une centaine de mots par arbre, il faut en tracer des lignes ! Oui mais avant cela, il faut être sûr(e) des espaces entre chaque nom, entre chaque ligne. Alors pour ne pas me tromper, je réalise toutes les calligraphies sur un papier à carreaux classique d’écolier, au brouillon. Je découpe ensuite ce que j’appellerai toute les « figures » (informations par personnes présentées sur l’arbre) afin de les positionner sur le support et d’équilibrer le tout.

C’est un peu comme un puzzle, sauf qu’il faut créer le modèle dans son esprit !

Une fois que j’ai placé toutes mes figures, je prends des mesures, des mesures et re-des mesures ! Quand j’ai re-re-re-vérifié 25 000 fois, que je suis bien sûre de moi, je me lance dans le tracé des lignes… Et ça prend du temps ! Surtout quand on sait que l’erreur est humaine 😀 et que je suis une humaine…

Je réalise les premiers noms en calligraphie au fur et à mesure afin de me donner du courage et de commencer à voir apparaître l’arbre :

La règle est ma meilleure amie à ce moment-là, ainsi que la délicatesse pour tracer avec une légèreté digne d’une hirondelle ! (Il faut que toutes ces lignes disparaissent à la fin).

Calligraphie des figures

Je réalise l’arbre agnatique sans trop de difficulté ni de drame. Je me sens comme une cocotte-minute Seb sous pression jusqu’à la dernière touche de plume (je n’ai pas droit à l’erreur, et vers la fin, l’excitation d’arriver au bout peut être FATALE hihi), mais tout se passe bien !

Vue de l'arbre généalogique, commande calligraphique
Un petit aperçu des premières lignes calligraphiées.

Quant au second arbre, la composition m’a pris beaucoup plus de temps. Il y avait du monde sur la première ligne ! Alors j’ai fait le choix de mettre les hommes au-dessus & leur femme en-dessous. La ligne de la génération suivante montre tous leurs enfants (créant les nouveaux couples de parents de la lignes suivantes, et ainsi de suite).

Calligraphie des noms… CONCENTRATION MAXIMALE !

Arrivée quasiment au bout de l’arbre, j’avais fait une pause. Et finalement je ne me sentais pas de reprendre le jour-même. Le lendemain, je tourne, je vire, il me reste quatre figures à placer, je me dis en début d’après-midi, allez Noémie, il va bien falloir arrêter de repousser, il ne reste pas grand chose, vas-y !

Et là… advient le drame !

Quand on ne le « sent » pas, il faut remettre à plus tard. Cela faisait plus d’un an et demi que je n’avais pas renversé mon encrier, bien entendu, il a fallu que cela m’arrive à ce moment-là ! Sur le coup, j’étais pétrifiée, en état de choc. Seule face à cet ouvrage noirci par une maladresse gestuelle, j’étais transie d’effroi, la tétanie m’empêchait de réagir. Une véritable douche froide.

Tâchée !
Renversant n’est-ce pas ?! Une tâche de 18 cm de long sur 15 cm de haut… Pur bonheur !

Je vais pour téléphoner à Benjamin & maman m’appelle à ce moment-là (ouf ! Je vais avoir quelques minutes pour prendre du recul avant de dévoiler le drame à mon commanditaire !). Finalement, je réalise peu à peu et accepte qu’il va me falloir recommencer le fond. Au moins, la composition est prête, les mesures sont prises, je vais aller plus vite tout de même !

Je téléphone à Benjamin pour confirmer avec lui que cette composition lui convienne & que le résultat est à la hauteur de ses espérances. Heureusement que j’ai commandé plusieurs feuilles au cas-où (car oui, je dois remettre les arbres au frère de Benjamin vendredi & nous sommes lundi). Il me confirme que c’est bon pour lui, je peux refaire le fond selon la même composition.

BIS REPETITA

Et finalement, je pense qu’une petite pointe de dorure entre chaque couple pour symboliser les alliances serait parfaite, alors je me lance dans cette finition toute douce qui va amener encore plus de préciosité à l’ensemble quand la lumière viendra en caresser les matières.

Les finitions à la dorure, de précieuses alliances qui brillent !

Voilà pour ce marathon calligraphique appliqué aux arbres généalogiques ! J’espère que cet article vous aura permis de mieux comprendre mon processus de création & de mesurer chaque étape de celui-ci. Vous l’aurez compris, chaque choix, chaque décision, rien n’est fait au hasard. C’est pour cette raison que le temps est nécessaire pour venir à bout d’une telle création.

J’ai été habitée par cette famille durant toute cette réalisation, et en calligraphiant, j’étais projetée dans la soirée d’anniversaire, au milieu des personnes en train de célébrer cet événement. Pendant la calligraphie, je ne fais qu’une avec l’oeuvre, je deviens l’oeuvre. Le temps se suspend, et l’imaginaire prend le dessus sur mon esprit, me laissant entrevoir où celle-ci va vivre, ce qui va l’entourer, quelles paroles vont être émises autour d’elle & quels corps vont se mouvoir sous ses « yeux ». Je souhaite que cette oeuvre enchante la vie de cette maman très aimée & qu’elle lui procure douceur & tendresse dans son quotidien !

N’hésitez pas à jeter un oeil à mon article sur l’analyse historique des arbres généalogiques

Et si vous souhaitez commander votre propre oeuvre généalogique, vous pouvez me contacter comme Benjamin l’a fait !